
Ciné thé
États-Unis, années 70. Une aura de mystère entoure les sœurs Lisbon, qui fascinent le voisinage alentour. Mais ce délicieux écrin se fissure lorsque Cecilia, la benjamine, commet une tentative de suicide que personne ne semble pouvoir expliquer. Sous des tons pastels et une luminosité solaire, le premier film de Sofia Coppola contient déjà toute la mélancolie de son œuvre. Elle y dresse une analyse fine du regard écrasant porté sur les jeunes femmes dès l’adolescence et de la résistance qui finit inexorablement par s’y opposer pour survivre. Une œuvre douce-amère, portée par l’entêtante musique du groupe Air !
"Le récit commence par la fin : au mitan des années 1970, dans une ville pavillonnaire du Michigan, les cinq soeurs Lisbon, toutes blondes et évanescentes, ont mis fin à leurs jours, inexplicablement — peut-être pour échapper au supplice de leur perfection. Ce sont leurs voisins de l'époque qui racontent en voix off, soit un collectif de garçons fascinés, inconsolables, pour qui les disparues conservent, des années après, l'aura de déesses inaccessibles.
Leur mémoire plurielle et exaltée donne au film sa forme spéciale, faite de réminiscences, de rêveries, de fantasmes flous, de souvenirs reconstruits. Sofia Coppola dévide ainsi une vaporeuse élégie, où le temps peut se dilater à la faveur d'un premier baiser, puis sauter sans transition d'avril à octobre. L'échéance qui plane au-dessus des soeurs Lisbon permet à la jeune cinéaste de déniaiser radicalement le film de teenagers. On reconnaît les figures imposées : surprise-partie à la maison sous l'oeil des parents, procession ridicule des garçons venus chercher les filles pour le bal de fin d'année, élection des roi et reine du lycée, dépucelage à l'aube sur un stade désert... Tout y est, mais tout scintille de l'éclat intense des dernières fois. Eternisée autour d'un tourne-disque, d'un téléphone et de quelques chansons sentimentales, l'adolescence est décidément le pays d'où l'on ne revient pas." — Louis Guichard (Télérama)