
Projection rencontre
Un film atypique dans la filmographie d’Adrian Lyne (Flash Dance, Liaison Fatale, 9 semaines ½) et dont le réalisateur s’emparera dès qu’on lui proposera le projet : un ancien soldat atteint de syndrome post-traumatique souffre d’hallucinations… Un scénario audacieux qui met à mal l’armée étatsunienne, et dont on ne veut surtout pas trop révéler, par peur d’amoindrir le choc que peut constituer une telle rencontre ! En effet, L’Échelle de Jabob est aussi un des films les plus dérangeants de l’histoire du cinéma. Ses images évoquent les peintures pleines de chair et de fureur de Francis Bacon. L’ensemble, d’une grande noirceur, est autant une plongée dans une psyché tourmentée qu’une puissante critique du sentiment de toute-puissance étatsunienne. Il distille un fort sentiment de désespoir et de tristesse : un véritable pamphlet anti-guerre, qui n’a rien perdu de son acuité et de sa virulence évocatrice.
Suivi d’une rencontre avec Elie Bartin, critique de cinéma et animateur de ciné-clubs
UN MOT SUR LE FILM
"Avec son soldat brisé par les expérimentations chimiques de l’armée US, L’Échelle de Jacob s’apparente à un Johnny Got His Gun mental. Une telle fiction sur le trouble de stress post-traumatique n’avait, en pleine guerre du Golfe, aucune chance de trouver son public aux États-Unis. [...]
Elle est devenue culte, a posteriori, pour ses démons humanoïdes aux visages déformés, qui doivent autant à la peinture (William Blake, Francis Bacon) qu’à la photographie (Diane Arbus, Joel-Peter Witkin). Conçues avec des effets spéciaux mécaniques façon « body horror » — voir l’incroyable séquence du brancard, avec un couloir d’hôpital qui se mue en accès à l’Enfer —, les créatures inspireront ensuite l’industrie du jeu vidéo (Silent Hill, Resident Evil).
Trente-cinq ans après la sortie, ce sont moins les scènes chocs qui frappent que les accalmies, poignantes, par contraste : chaleur hivernale du foyer familial, harmonies délicates du piano de Maurice Jarre, douceur paradoxale d’un chiropracteur — saisissant Danny Aiello, dans sa période faste, après Do the Right Thing. Ces éclaircies s’annoncent dès l’entame, où, dans le fracas du Vietnam, des GI dorment paisiblement…" - Nicolas Didier, Télérama
